Dans la paroisse de Molsheim-Mutzig, 38 personnes se partagent la tâche de distribuer tous les deux mois les magazines Le Nouveau Messager à 600 foyers. À Mutzig, Robert Eben est l’un d’eux.
Au départ de son domicile d’une petite rue de Mutzig, Robert Eben s’équipe de sa sacoche orange. Dedans, 33 exemplaires du numéro de Noël du Nouveau Messager qu’il va distribuer ce lundi après-midi de fin décembre dans un rayon de 500 mètres autour de chez lui. Le pasteur les lui a livrés dans le week-end, à lui de jouer désormais. Le septuagénaire traverse les rues de Mutzig d’un pas décidé. «Depuis dix ans que je fais ça, je connais le chemin par cœur, confie cet homme taiseux, ancien conseiller presbytéral. Je fais ça pour rendre service. Je ne participe plus aux activités de la paroisse, mais s’il y a besoin, on sait qu’on peut compter sur moi.» Robert Eben a méticuleusement réglé son trajet : « J’y vais en enfilade, pour ne jamais passer deux fois au même endroit.»
Depuis qu’il s’occupe de porter le magazine aux lecteurs de son quartier, cet hyperactif, opticien à la retraite qui enseigne encore sa discipline dans une classe préparatoire au BTS, compte les adresses qui ne sont plus occupées. «Il y a les déménagements et surtout les personnes âgées qui partent en Ehpad.» Quand une boîte aux lettres n’est plus relevée, inutile d’insister. Robert Eben conserve les journaux en surplus pour l’école du dimanche. Quand un nouveau foyer occupe une ancienne adresse, le porteur sait aussi qu’il n’est pas de bon ton de continuer à déposer le magazine. «On ne peut pas imposer un journal religieux, c’est parfois mal perçu.» En dix ans, il estime qu’une quinzaine d’adresses ont disparu de sa liste.
Sur les hauteurs de la commune, Robert Eben ne ralentit pas son pas, coiffé d’une simple casquette pour contrer la pluie qui s’annonce. «Ça maintient en forme», sourit-il. Dans l’entrée d’un immeuble, il n’hésite pas une seconde entre les nombreuses boîtes aux lettres. «C’est pour moi !», se réjouit un habitant avant de se précipiter sur la sienne. Robert Eben s’est déjà éloigné, à l’assaut de la dernière côte à gravir de ce côté de Mutzig. «Ça fait plaisir de vous rencontrer pour une fois», apprécie une vieille femme occupée sur le pas de sa porte de retour dans le bourg. Là encore, aucune arrière-cour ni aucune boîte cachée ne ralentit le porteur. Il les connaît toutes, comme les raccourcis. «À force, on optimise», répète-t-il en pragmatique. L’homme n’a pas encore survolé Le Nouveau Messager, qu’il découvrira au retour de sa tournée d’une heure. «Ensuite, je le ferai passer à ma famille.»
Claire Gandanger