
« Tu peux t’en aller. » Quelques mots chuchotés à un ami vaincu par sa leucémie, à une grand-mère rassasiée des jours, à une paroissienne épuisée par sa maladie... Quelques mots prononcés discrètement, sa main dans la mienne, juste après une prière, sans savoir si j’étais entendue. Une phrase dite dans un souffle avec un peu de honte, comme s’il s’était agi d’un aveu d’abandon, d’un renoncement trop facile à l’espoir, d’un souhait égoïste que l’autre se laisse aller à la mort. Enfin. « Tu peux t’en aller. » En réalité, comment ne pas souhaiter que la décision d’abréger les souffrances et l’agonie n’appartienne qu’à la personne concernée ou en tout cas à quelqu’un d’autre ? Le Talmud dit que visiter un malade, c’est prendre un peu sur soi de sa souffrance, plus précisément 1/60e de sa souffrance. Qu’en est-il du malade mourant ? Que dois-je prendre sur moi ?
La fin de vie interroge d’abord l’intime, même si la médecine, le politique et le droit, le spirituel et les religions, la théologie, l’éthique et la philosophie tentent et donnent souvent des réponses à la question du mieux mourir. Pour aller un peu plus loin et compléter le dossier de ce numéro, le Nouveau Messager organise une conférence avec Olivier Peterschmitt, philosophe, enseignant et rédacteur du Coin du philosophe. À partir de l’affaire Vincent Lambert, il a élaboré un parcours éthique sur la question de la fin de vie qu’il a publié en mai dernier aux éditions de L’Harmattan. Pour sa conférence, Olivier Peterschmitt précise que « son but sera de conduire l’auditeur à suspendre son jugement. Dans un monde de plus en plus clivé et brutal, il est indispensable d’apprendre à faire silence pour être plus réceptif à la nuance et au sens de la complexité. » Cette conférence du Messager, la première du genre, est organisée en collaboration avec la Médiathèque protestante du Stift. Elle se tiendra le mardi 22 avril à 18h à Strasbourg.
Dans les pages de ce numéro, vous découvrirez une autre nouveauté : la rubrique « Théologies ». Nous l’inaugurons avec la présentation de la théologie libérale d’Albert Schweitzer dont l’année 2025 marque les 150 ans de la naissance.
Gwenaelle Brixius,
rédactrice en chef
mars-avril 2025