Héritage. Droit d’usage. Transmission. Lorsque de tels mots font partie d’une conversation, il est à parier que la situation familiale de ceux qui les utilisent est en train de se modifier parce qu’un être cher vient de s’éteindre. C’est alors que, souvent, les lieux et les objets sont emplis d’un sens plus personnel, plus intime.
Car oui, tous, nous avons été ou serons un jour ou l’autre bousculés par une telle rupture. Que reste-t-il alors ? Des souvenirs plus ou moins précis. Plus ou moins heureux aussi. Et puis, parfois, une parole tout à coup devenue essentielle. Patrimoine immatériel de ce qui nous fait, à la fois humain et unique. Une parole dont on se souvient et qui vient alléger le poids de la séparation par le sens fort qu’elle aura pu avoir. Une parole ou un objet d’ailleurs.
Il y a du mystère dans la transmission. Parce que le sens premier est vite relégué aux oubliettes et que le sens profond de cette parole ou de cet objet nous permet de continuer le chemin, de tenter non d’effacer la tristesse, mais d’aller au-delà. « On avance. C’est une évidence, on n’a pas assez d’essence pour faire la route dans l’autre sens » chantait Alain Souchon. Et c’est bien vrai ! Indiscutable même. Mais cheminer avec cette parole qui m’a marquée ou avec cet objet qui m’évoque tant de choses, c’est en quelque sorte reculer pour mieux avancer.
Cela peut aussi s’apparenter au passage de témoin. Le témoin, dans une course de relais, c’est le bâton que les coureurs se transmettent. Et ce numéro de rentrée du Nouveau Messager vient vous présenter des femmes et des hommes qui ont donné ou reçu, tel le témoin du sportif, et qui en ont été grandis. Car la course de ma vie n’est jamais solitaire. L’aventure des décennies qui me sont offertes s’inscrit dans bien plus grand que moi, me dépasse en fait totalement. Et c’est véritablement une belle aventure.
Voilà quelques semaines, je déjeunais avec un ami plus âgé que moi qui me relatait comment il avait invité son petit-fils au restaurant, en tête à tête, alors qu’il était âgé de huit ans seulement. Ce dernier se rappelle aujourd’hui encore avec émotion ce que son grand-père lui avait alors inculqué de valeurs importantes pour construire sa vie. Devenu papa à son tour, il n’a pas oublié le petit garçon aux yeux grands ouverts d’admiration et aux oreilles attentives qu’il était et sait maintenant qu’à son tour il lui revient de faire passer le témoin. Celui du sens de la vie. Celui qui, pour tous les chrétiens de la terre, est à l’image du Christ qui est et reste de toute éternité « le chemin, la vérité et la vie ». En Lui, je vous souhaite une période de rentrée calme et confiante.
Philippe Ichter
Président du Conseil d’administration du Messager