Éliane Weiss a été la secrétaire de rédaction du Messager évangélique durant toute son histoire de 1970 à 2001, et même un peu avant et un peu après lorsque l’hebdomadaire est devenu Le Messager. À l’occasion du dixième anniversaire du Nouveau Messager, elle revient sur l’évolution du journal.
Comment le fonctionnement du Messager évangélique a-t-il évolué au cours de votre carrière ?
Quand j’ai commencé en 1967, Le Messager évangélique avait encore son édition luthérienne et un supplément réformé. Il n’a plus fait de distinction à partir de sa formule née en 1970. Avant cette époque, nous étions installés au presbytère de Neuwiller-lès-Saverne, où le directeur Georges Kempf était pasteur. Il s’occupait alors des huit pages en allemand tandis qu’André Ostertag, de la paroisse de Cronenbourg-cité à Strasbourg, s’occupait des quatre pages en français, qu’il nous envoyait par courrier. Une fois par semaine, Georges Kempf déposait au train à Saverne le contenu du journal, qui partait chez notre imprimeur à Schiltigheim. Puis celui-ci nous renvoyait les épreuves à corriger. L’imprimeur travaillait aux lettres de plomb. Quand nous avons déménagé dans les locaux de l’Église à Strasbourg en 1988, après seize années rue Sainte-Barbe à Strasbourg déjà, notre passage à l’informatique a tout changé. Nous saisissions les textes et composions les pages sur écran grâce à un logiciel puis envoyions nos disquettes à l’imprimeur. Ensuite un nouveau logiciel de mise en page et Photoshop, pour traiter les photos, nous ont permis de monter les pages du début à la fin. Sans tous ces allers-retours, les rédacteurs avaient plus de mobilité pour leurs articles. Cinq rédacteurs en chef différents se sont succédé pendant mes années au journal, dont la première femme en 1997. (ndrl : Jean-Paul Haas, Frédéric Westphal, Pascal Hickel, Jean-Luc Mouton, Christian Kempf et Anny Goetzmann).
La langue allemande a longtemps eu une place très importante dans le journal...
Oui, j’ai été recrutée au Messager évangélique parce que j’étais bilingue. La majorité des pages étaient rédigées en allemand, à l’image des cultes du dimanche qui étaient conduits dans cette langue dans les paroisses. Par ailleurs, nous recevions tous les journaux protestants allemands. Une rédactrice allemande écrivait même régulièrement pour nous et nos rédacteurs écrivaient pour les journaux frontaliers. Il y a aussi eu quelques numéros communs.
Qui étaient les lecteurs ?
Nous nous adressions surtout à un lectorat rural. Nous avons eu jusqu’à près de 40 000 abonnés. Les gens avaient des abonnements groupés et nous avions un distributeur dans chaque paroisse. Chaque paroisse avait en plus son bulletin paroissial. Aujourd’hui, Le Nouveau Messager les fédère et je trouve ça super.
Comment la ligne éditoriale du journal a-t-elle évolué selon vous ?
Le Messager évangélique était plus dans l’évangélisation. Il était centré sur les événements des Églises, en Alsace comme en France et dans le monde. Longtemps, le rédacteur en chef Frédéric Westphal était en responsabilité à la Fédération luthérienne mondiale, ce qui lui donnait une ouverture sur l’actualité protestante à l’international. Le journal s’est ouvert à travers le temps à l’actualité du monde mais toujours en la raccrochant à l’Évangile. C’était un journal d’opinion, qui prenait position. Cela appelait des courriers des lecteurs virulents. Les pages qui y étaient consacrées étaient pleines toutes les semaines. Georges Kempf et Frédéric Westphal n’hésitaient pas à lever des questions gênantes quand ils jugeaient les Églises trop sages. Les relations entre catholiques et protestants, encore difficiles, prenaient aussi une place importante. Aujourd’hui toutes ces tensions se sont atténuées et Le Nouveau Messager s‘est détaché des problématiques internes aux Églises. Le journal est sorti de sa coquille pour interroger la place des chrétiens dans la mondialisation. Cela répond aux nouvelles problématiques de notre époque.
Propos recueillis par Claire Gandanger