Il y a 90 ans, Barmen

 

Du 29 au 31 mai 1934 à Wuppertal, dans le quartier de Barmen, s’est tenu le premier synode de l’Église confessante allemande (Bekennende Kirche). Il réunissait ceux des protestants allemands luthériens, réformés et unis, qui ne voulaient pas demeurer dans une Église destinée à devenir celle du Reich d’Hitler. Ce synode est connu pour avoir promulgué un texte théologique important : la Déclaration de Barmen.

 

Devant la montée des intentions de vote pour le parti d’extrême-droite allemand AfD (Alternativ für Deutschland), les Églises protestantes – et catholique – en Allemagne manifestent leur opposition à une idéologie qu’elles estiment être contraire à l’Évangile. Il y a quelques mois, l’évêque de l’Église du Wurtemberg, Ernst-Wilhelm Gohl, déclarait dans le magazine Évangile et Église (Evangelium und Kirche) : « Qui foule aux pieds la dignité humaine comme le fait l’AfD ne peut pas être un choix électoral pour les chrétiens et les chrétiennes ! Ceci n’est pas une déclaration partisane, mais théologique. » Et le pasteur de faire référence aux derniers mots de la déclaration de Barmen, « La parole de Dieu demeure éternellement », qui donne courage et exigence « pas seulement il y 90 ans, mais aussi aujourd’hui », conclut-il.

Pour rappel, en mars 1933, le parlement allemand confère les pleins pouvoirs à Hitler. Quelques mois plus tard, les élections au sein de l’Église protestante allemande mènent à la victoire le Mouvement des Chrétiens allemands (Deutsche Christen) favorables à Hitler. Ils prennent le contrôle de presque toutes les Églises régionales. Ils peuvent ainsi constituer une Église du Reich. Ils désignent pour les diriger un évêque, Ludwig Müller, membre du parti nazi depuis 1931 et, entre autre, excluent du ministère pastoral les personnes d’origine juive. 

C’est en opposition à ces élections de 1933 et à la théologie nazie de ses responsables ecclésiaux que le synode de l'Église confessante à Barmen, qui réunit 139 représentants des Églises régionales, adopte une déclaration qui dénonce la « fausse doctrine » des Chrétiens allemands.

 

Résistance théologique

Rédigée pour l’essentiel par les théologiens Karl Barth et Hans Asmussen, cette déclaration développe en six thèses l’idée que l’Église est soumise à Dieu seul et à sa Parole, sous-entendu qu’aucun Führer ou idéologie politique ne saurait être son fondement. À côté de Dietrich Bonhoeffer ou de Martin Niemöller, la plupart des membres de l’Église confessante cherchaient surtout à empêcher l’ingérence du régime nazi dans les affaires ecclésiales. Après 1945, la déclaration de Barmen aura statut de confession de foi en Allemagne et ailleurs. Ainsi, dans Jalons pour vivre, croire et témoigner ensemble, un fascicule publié par l’Uepal en 2015, nous lisons : « Au XXe siècle, de nouvelles formulations de la foi, comme la Déclaration de Barmen (1934), ont cherché à actualiser le message de l’Évangile face aux dé?s du temps présent. Avec les confessions plus anciennes, ces textes nous encouragent à témoigner aujourd’hui avec joie et con?ance de notre foi et de ce qui la fonde, à savoir la bonne nouvelle de l’Évangile. »

Gwenaelle Brixius

 

Photo: © Frank Vincentz/wikipedia - Le mémorial de la Déclaration de Barmen à Wuppertal symbolise le Kirchenkampf, le conflit au coeur de l’Église protestante allemande pendant la période nazie.

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