Si déjà certains arbres perdent leurs feuilles, l’automne reste une saison aux couleurs cuivre et or, aux parfums boisés et à l’atmosphère encore chaleureuse et rassurante. Pendant que nombre d’entre nous célébreront la fête des récoltes, nos amis juifs seront invités à demeurer sept jours durant sous une demeure provisoire (Lévitique 24, versets 34 à 43) dont la tradition nous dit qu’elle était faite de branchages, feuillages et petits bois tombés au sol. Évoquant la fragilité de l’existence, la fête des tentes, ou Sukkot, devait rappeler aux Israélites leur séjour au désert après la sortie d’Égypte. Or il se trouve que nos amis juifs se doivent également de préparer le lulav, bouquet constitué de quatre espèces de végétaux différents récoltés pendant l’automne. Parmi eux, le cédrat, appelé selon la Bible, « fruit des beaux arbres ». En réalité, ici le mot biblique utilisé pour signifier la beauté (Hadar) peut se décomposer et signifier alors «ce qui dure», « ce qui est permanent ». En effet, le cédrat oriental est un fruit qui, contrairement aux autres fruits, pousse, grandit et arrive à maturité en toutes saisons. Il dure, et endure, quels que soient le temps et la situation.
On retrouve ce même mot dans les Proverbes (20, verset 29) : « Les cheveux blancs sont la beauté des vieillards. » Ainsi donc, la Bible identifie la beauté à ce qui a duré et enduré. D’un côté donc, il est demandé d’habiter sous les tentes temporaires et de l’autre, de tenir dans sa main à un moment de la fête, un fruit dont la beauté est signe de permanence et de durée. Si en automne, nous engrangeons généreusement les récoltes, l’esprit de Sukkot, fête de la joie également, nous propose (et c’est une interprétation) de reconnaître la fragilité de l’existence en résidant sous des tentes, tout en affirmant, avec le cédrat beau par sa durée et son endurance, la victoire d’une présence continuelle : celle de Dieu dans nos vies. Dans les temps de tremblements et de désarroi, j’aime penser à la beauté du cédrat. Me viennent alors au cœur les paroles du psalmiste : « Compte sur le Seigneur, sois fort, reprends courage, compte sur le Seigneur» (Psaumes 27, verset 14).
Emmanuelle di Frenna,
pasteure-aumônier des hôpitaux privés de Metz