« Pour le moment, il voulait faire comme tous ceux qui avaient l’air de croire, autour de lui, que la peste peut venir et repartir sans que le cœur des hommes en soit changé. »
Albert Camus, La Peste, 1947
À l’heure où j’écris ces lignes, nous ne sommes pas vraiment tranquilles. Après un temps de soulagement faisant échoaux dernières pages de La Peste de Camus, où le mouvement semblait jaillir, la vie reprenant doucement ses droits, voilà que les épreuves passées se rappellent à nous un peu partout en France, comme en Europe. Les restrictions reviennent. Les frontières deviennent un peu plus fermées. Les couvre-feux s’installent dans certaines métropoles. Bref, des mesures sont prises pour sauvegarder les uns et les autres.
Certes, nous nous sommes habitués aux coups de coude plutôt qu’aux poignées de main et les masques sont devenus notre quotidien. Les circonstances sont étranges depuis quelques mois. Mais comme à la fin de l’ouvrage de Camus, une pensée est sortie : « Et si ça revenait ? » Pour nous, cette formule craintive devient progressivement réalité. À la sortie des cultes, dans les journaux ou chez le boulanger se glisse un murmure qui se transforme en cri : « Le virus circule ! » On voulait croire à l’accalmie, mais il revient, malgré tout, et avec lui, la peur, l’isolement nécessaire, mais aussi une part de colère et de frustration.
Face à cela, nous sommes nombreux à nous sentir impuissants. C’est souvent mon cas, en tout cas. Mais c’est là que je me rappelle ma vocation de baptisé. Le virus circule ? C’est donc d’autant plus notre mission de continuer à faire circuler autre chose ! Un autre virus, si j’ose dire... Ou plutôt, une autre espérance.
Cette dernière passe par la parole, et notamment la Parole de Dieu. Plus que jamais, nous avons besoin de ce stock inépuisable d’espérance, de réconfort et d’amour de l’Évangile, mais aussi tout son potentiel d’interrogation et de remise en question. Que ce soit en public ou en privé, en ligne ou hors ligne, par téléphone ou en face à face, dans nos cultes et dans les cafés : que nous puissions faire résonner dans nos vies et dans le monde l’Évangile qui relève !
Jean-Philippe Lepelletier, pasteur à Sainte-Marie-aux-Mines
novembre-décembre 2020