« On ira tous au paradis, même moi. » Ah ça, c’est du Polnareff ! Et c’est aussi de la théologie ! Dans notre jargon, cela s’appelle l'apocatastase. C’est une notion très discutée parce qu’il peut être difficile de penser que seront récompensés ceux qui ont fait le bien toute leur vie comme ceux qui ont fait du mal. Or, dans l’Évangile de Matthieu, Jésus ne parle-t-il pas de séparer les chèvres et les brebis, les mauvais et les bons ? Il est tout aussi difficile d’imaginer un Dieu qui abandonnerait ses enfants définitivement selon ce qu’ils ont fait ou ce qu’ils ont été. Mais peut-on réduire tout cela à une question de morale ? Soyons honnêtes, personne n’est tout à fait brebis ou tout à fait chèvre. On peut espérer que lorsque Jésus parle de les séparer, il peut s'agir de séparer le bon et le mauvais en nous, et que donc, nous pourrions tous aller au paradis !
L’apocatastase, c’est étymologiquement un rétablissement dans un état originel d’unité avec Dieu*. Il s’agit en quelque sorte d’un retour aux sources de la relation Dieu-Homme, avant cette fâcheuse histoire d’Ève, d’Adam et de fruit... Le Christ n’est-il pas témoin et artisan de cette réconciliation entre Dieu et l’Homme ? Cette idée peut plaire parce qu’en croyant que tout le monde retourne à Dieu à sa mort, on espère aussi retrouver ceux qu’on a aimés. Il est délicat cependant d’affirmer cela de manière radicale : au fond, on ne sait pas ce qu’il se passera.
Nous ne sommes pas Dieu et ce n’est pas nous qui décidons.
Question de confiance donc, et de lâcher prise sur une question dont Dieu seul a le dernier mot !
* Brian E. Dalley, “Apocatastase”, Jean-Yves Lacoste (dir.), Dictionnaire critique de théologie, Paris, PUF, 2007, p. 88.
Sophie Herrlé, pasteure
et Frédéric Frohn, pasteur