Avec sa campagne « Il paraît que… », l’association de vulgarisation scientifique Les Petits débrouillards intervient dans les écoles, les collèges et les lycées mais aussi auprès d’adultes volontaires en service civique pour amener les publics à se questionner sur les fausses informations. Laure Digonnet, coordinatrice Grand Est de la campagne nous explique la démarche.
Comment se déroulent vos interventions ?
Elles sont très courtes. Donc nous passons par des choses très concrètes. Par exemple une fausse information qui circule sur l’apparition des chats, et selon laquelle des chatsseraient apparus soudainement au temps des égyptiens. Nous allons la décortiquer par une démarche expérimentale. Les thématiques ne sont qu’un prétexte à la discussion et au travail méthodologique. C’est une démarche scientifique par le jeu. On leur apprend à sortir toutes les hypothèses, pas seulement celles qui leur parlent. Puis nous menons des investigations pour valider ou invalider chacune d’entre elles. Les participants peuvent faire des expériences contre-intuitives avec des résultats étonnants. Nous apprenons à distinguer une croyance d’un fait et montrons qu’on peut se laisser prendre et que des gens sont très forts pour nous tromper. Les participants sont souvent déstabilisés. Certains restent dans leur retranchements et affirment, un peu catégoriques, que les conclusions ne sont pas vraies. C’est une sorte de protection. D’autres sont sur la réserve : c’est faux pour cette fois, mais il y a d’autres exemples où c’est vrai.
Qu’est-ce qui est le plus compliqué lors des séances ?
Il faut d’abord comprendre comment une fausse information arrive. La première défense des participants est de dire qu’ils l’ont vue sur les réseaux sociaux. Il nous faut leur faire comprendre qu’un réseau social n’est qu’un vecteur et qu’il se distingue d’un média avec une ligne éditoriale. Il y a peu d’endroits où on nous l’explique. On leur apprend aussi que les algorithmes sont faits pour ne leur monter que ce qu’ils veulent voir. On les sent mal à l’aise d’entendre que toutes les informations ne se valent pas et qu’il faut vérifier ses sources.
Qu’est-ce que vous espérez leur transmettre ?
L’esprit critique est quelque chose à entretenir toute sa vie. Nous n’allons pas faire bouger les lignes en un temps si court. Nos interventions sont des gouttes d’eau. Nous aimerions que nos publics soient en capacité d’être vigilants sur les questions qui concernent la vie collective, pour pouvoir s’impliquer dans les choix de société. On peut bien sûr avoir un avis sur des sujets sans avoir fait des recherches approfondies. Nous ne pouvons pas exercer notre esprit critique sur tous les sujets de la vie. Mais il faut en être conscient. Ce n’est pas grave de ne pas connaître toute la vérité autour du braquage de la starlette Kim Kardashian, mais s’il s’agit de croire que la terre est plate, alors cela devient plus problématique. L’esprit critique est une question de citoyenneté et de vivre ensemble.
Propos recueillis par Claire Gandange