Deux aumôniers aux Jeux Olympiques

Anne-Marie Heitz-Muller et Severin Schneider, pasteurs de l'Uepal, ont fait partie de l'équipe des aumôniers des sportifs créée spécifiquement par la Fédération protestante de France pour les Jeux Olympiques de Paris 2024. Retour d’expérience…

Anne-Marie Heitz-Muller : Severin, je suis sûre que les lecteurs sont curieux ! Peux-tu raconter comment s’est passée notre formation à cet événement si particulier ?

Severin Schneider : Nous nous sommes portés candidats pour cette aventure et, après une première phase de sélection, nous avons pu participer à la formation. Toutes les personnes présentes justifiaient déjà d’une formation à l’écoute, d’un intérêt pour le monde du sport et pour l’articulation entre sport et foi. Pendant un an, nous avons suivi toute une série de formations sur des aspects bibliques, éthiques, sociologiques. Certaines par visioconférence –nous venions de toute la France –, d’autres en présentiel qui ont permis de souder le groupe. Et fin avril, enfin, nous avons eu la bonne nouvelle : nous allions pouvoir accompagner les sportifs dans le Village olympique !

A.-M. : Et pour accueillir les sportifs au mieux, il a fallu travailler ! Il faut dire que le lieu d’aumônerie était mal placé dans le Village ! Mais on a réussi à le rendre attrayant, en concertation avec les autres confessions chrétiennes. Les protestants ont apporté une belle bible ancienne, les catholiques une croix qui avait servi lors des Journées mondiales de la jeunesse et les orthodoxes des icônes. Chacun se sentait chez soi ! On célébrait aussi ensemble plusieurs fois par jour. Nous avions des temps de partage biblique, de chants, de prière. Sur un côté, nous avons conçu un espace avec un parcours, qui permettait de cheminer seul, en silence, de réfléchir, de méditer. Nous avions aussi un espace plus intimiste pour des entretiens particuliers. Les gens repartaient heureux, apaisés ou réconfortés. À ce sujet Severin, peux-tu décrire un moment qui t’a particulièrement marqué ?

Le langage du sport

S. : J’ai vécu des moments à la fois riches et divers, j’ai partagé des temps de prière avec des athlètes très connus, avec des coachs avec qui j’ai pu partager des temps de louange, avec des volontaires comme celle à qui j’ai pu donner un Nouveau Testament. Au-delà de ça, c’était toute la vie du Village qui était belle à voir. Pendant deux semaines, des personnes venant de centaines de pays différents, des athlètes, coachs, préparateurs physiques et mentaux, médecins, volontaires, postiers, restaurateurs, agents d’entretien, agents de sécurité, aumôniers, tous vivaient en paix les uns avec les autres. L’humain est capable de vivre sans se taper dessus. À en croire les actualités géopolitiques, ça semble inimaginable et pourtant, sachez que c’est possible !

A.-M. : Oui, moi aussi, je retiens bien sûr les rencontres personnelles, avec des temps d’écoute particulièrement profonds, mais aussi cette harmonie et cette joie présente dans le Village. Au-delà des handicaps, des frontières géographiques, sociologiques, politiques. Quelle joie de discuter – particulièrement peut-être en tant que femme pasteure – en toute simplicité avec un rabbin et un imam, sur nos performances sportives. Et, ce faisant, digresser tout naturellement sur notre rapport à l’effort, à la foi, aux autres. Le sport est vraiment devenu un langage accessible à beaucoup, qui ouvre des portes sur des sujets bien plus essentiels !

S. : J’irai jusqu’à dire que, pour moi, cette expérience a été apocalyptique ! Dans le sens où elle a été une véritable révélation, aussi bien pour ma compréhension du monde que pour ma foi. J’ai là redécouvert Dieu, dans toute sa fragilité, mais aussi et surtout, dans tout son amour. Là où on ne l’attendait peutêtre pas, là où on ne souhaitait pas trop qu’il soit pour certaines autorités, Dieu s’est rendu présent.

A.-M. : Oui, nous avons vraiment senti la présence bienfaisante de Dieu dans ce lieu ! Je me suis sentie utile, à ma place, face à des situations de solitude, de grande détresse, ou de pure joie : disponible à tout un chacun lorsque le besoin s’en faisait sentir, simple témoin de l’Évangile. Nous tenons aussi à remercier ici notre Église de nous avoir permis de participer à cette formidable aventure, ainsi que toutes celles et ceux qui nous ont portés dans leurs prières. Nous revenons pleins de gratitude, d’Espérance et de projets pour l’avenir !

S. : Avec toujours en tête ce fil rouge, ce verset que j’ai lu le matin de mon départ pour les Jeux Olympiques, que je vois comme un clin d’œil de Dieu : « Tout ce que vous faites, faites-le de bon cœur, comme pour le Seigneur, et non pour des humains. En effet, vous le savez, le Seigneur va vous récompenser : vous recevrez les biens qu’il garde pour son peuple. Le Maître, c’est le Christ, c’est lui que vous servez. » Oui tout pour Dieu ! Tout pour Sa gloire !

Anne-Marie Heitz-Muller et Severin Schneider